Daria de Beauvais

© François Bouchon
Daria de Beauvais est historienne de l’art, curatrice, autrice et enseignante. Actuellement Curatrice Senior et Responsable des relations internationales au Palais de Tokyo, elle y a été commissaire ou co-commissaire de nombreuses expositions, dont récemment : Raphaël Barontini (2025), Myriam Mihindou (2024), «Dislocations» (2024), «Doppelganger !» (2023), Marie-Claire Messouma Manlanbien (2023), «Réclamer la terre» (2022), Mimosa Echard (2022), Jonathan Jones (2021), «Anticorps» (2020). Elle a participé à plusieurs grands événements d’art contemporain : 15e Biennale de Lyon (co-commissaire, 2019), 49e Rencontres d’Arles (commissaire invitée, 2018), Nuit Blanche (commissaire associée, 2016), Expo Chicago (section vidéo, 2016). Elle enseigne la pratique de l’exposition dans le Master 2 professionnel « Sciences et techniques de l’exposition » à l’université Panthéon-Sorbonne et est co-responsable avec Morgan Labar du séminaire « Autochtonie, hybridité, anthropophagie » au département Arts de l’École normale supérieure (Paris).
Les galeries participant à l’édition 2025 du Paris Gallery Weekend présentent un programme de haut vol, dans lequel j’ai sélectionné sept propositions :
La galerie Anne Barrault a donné Carte blanche à la jeune curatrice indienne Skye Arundhati Thomas. Cette dernière a notamment été co-commissaire de « Autohistorias », exposition très réussie aux Beaux-Arts de Paris en 2024, dans le cadre de la filière « Artistes & Métiers de l’exposition ». Après avoir publié sa biographie aux Presses du réel l’an dernier, elle propose une exposition de Lalitha Lajmi (1932-2023), peintre autodidacte indienne dont la première rétrospective a eu lieu seulement à la toute fin de sa vie, à la National Gallery of Modern Art de Mumbai. Comme pour beaucoup d’artistes femmes, son travail a été reconnu sur le tard.
Après avoir été représenté·e par gb agency jusqu’à sa fermeture, Tirdad Hashemi a rejoint Christophe Gaillard qui l’expose pour la première fois. Cet·te artiste iranien·ne est actuellement en résidence avec Soufia Erfanian (qui bénéficie également d’une exposition à la galerie) à Lens avec Pinault Collection. J’ai eu l’occasion de travailler avec iel pour l’exposition collective « Dislocations » au Palais de Tokyo en 2024 (co-commissariat avec Marie-Laure Bernadac, en collaboration avec l’association Portes ouvertes sur l’art). Son travail sur la représentation des corps et des identités plurielles est d’une grande force. Il y a une forme d’urgence dans sa pratique, qui explore les failles existant entre l’isolement et les communautés électives.
Alison Saar, artiste états-unienne peu connue en France, expose à la galerie Lelong. Elle travaille sur l’identité féminine noire et ses influences sont plurielles : culture afro-américaine, folklore et spiritualités caribéens, mythologie, art brut… Elle a été invitée à réaliser la sculpture officielle des jeux olympiques, qui est désormais visible au Jardin Charles Aznavour dans le 8e arrondissement. Il est à noter qu’elle est la fille de Betye Saar, artiste à (re)découvrir absolument. Quant à la galerie Lelong, je suis touchée par son histoire commune avec des artistes qui me tiennent particulièrement à cœur, comme Louise Bourgeois ou Ana Mendieta.
La curatrice Ana Mendoza Aldana a Carte blanche chez Marcelle Alix. Je suis sa pratique liant art et littérature avec intérêt depuis plusieurs années. Son projet « El Fantasma de Tennessee » est une exposition collective sur la mélancolie – sentiment largement exploré dans l’histoire de l’art – à partir de trois œuvres de Tennessee Williams et de leur adaptation filmique. Elle a invité onze artistes de générations et de cultures différentes : Ella C Bernard, Cécile Bouffard, Omar Castillo Alfaro, Caroline Rose Curdy, Pierre Dumaire, Laura Huertas Millán, Liz Magor, Rafael Moreno, Nicole, Hatice Pinarbaşi et Jean-Charles de Quillacq. Je connais et apprécie le travail de certain·es, notamment Liz Magor et Hatice Pinarbaşi, et me réjouis d’en découvrir d’autres.
Tai Shani, co-lauréate du Turner Prize en 2019, présente sa première exposition en France grâce à une Carte blanche donnée par la galerie Suzanne Tarasiève à la curatrice Camille Bréchignac. La pratique multidisciplinaire de l’artiste britannique, qui comprend performances, films, photographies et installations, s’articule autour de textes narratifs expérimentaux. Puisant dans le punk rock, le cinéma underground, la mythologie grecque, la théorie féministe, l’occultisme ou encore la science-fiction, Tai Shani imagine des univers sombres et fantastiques, à la lisière du grotesque et du gothique. Elle présente ici des œuvres liant anatomie et architecture, en une vision anthropomorphique du monde.
Jocelyn Wolff représente Diego Bianchi depuis une dizaine d’années. Pour sa nouvelle exposition à la galerie, l’artiste argentin présente une série de scènes figées, en latence. Il travaille souvent avec des objets trouvés, attirant l’attention sur les excès de la société de consommation. Ses sculptures hybrides et pleines de ramifications, évoquant parfois des organes ou des membres humains, conservent une forme d’ambiguïté, voire d’opacité, face aux tentatives d’interprétation. Réadapter, réajuster, dévier, font partie de ses gestes de prédilection afin de faire advenir l’inattendu – tout comme le fait de sortir le spectateur, autant que lui-même, de sa zone de confort.
Je conclus avec la galerie Zlotowski, spécialisée dans les avant-gardes du vingtième siècle. C’est aussi un choix affectif, car j’y ai travaillé il y a plus de vingt ans. Carte blanche a été donnée à Cécilia Becanovic, pour une exposition collective dont le très beau titre est « Chevaliers errantes », un dialogue entre des artistes modernes et contemporain·es : Pierrette Bloch, Ella Bergmann-Michel, Louise Bourgeois, Anne-Lise Coste (Uruk), Sonia Delaunay, Jochen Lempert, Sol Lewitt, Vera Molnar, Anthony Plasse, Helen Mirra, Kurt Schwitters, Georges Valmier, Arnaud Vasseux, Josselin Vidalenc et Zohreh Zavareh. Je suis intéressée par cette vision de l’artiste en croisade, comme les chevaliers errants du Moyen Âge partant seuls afin de réaliser leurs idéaux.
- Daria de Beauvais
Retrouvez aussi les coups de cœur de Daria de Beauvais en vidéo :
Ses recommandations
-
Galerie Anne Barrault
Lalitha Lajmi , Inde
- Art contemporain
- Artistes femmes
- Carte blanche
- Peinture
- Première exposition
- Scène asiatique
-
Galerie Christophe Gaillard
Tirdad Hashemi , Iran
"Butchered Bodies"
- Art contemporain
- LGBTQ+
- Peinture
- Scène asiatique
-
Galerie Lelong
Alison Saar , États-Unis
"Sweet Life"
- Art contemporain
- Artistes femmes
- Peinture
- Première exposition
- Sculpture
-
Marcelle Alix
Ella C Bernard, Cécile Bouffard, Omar Castillo Alfaro, Caroline Rose Curdy, Pierre Dumaire, Laura Huertas Millán, Liz Magor, Rafael Moreno, Nicole, Hatice Pinarbaşi et Jean-Charles de Quillacq
--
"El fantasma de Tennessee"
- Art contemporain
- Art-activisme / engagé
- Artistes femmes
- LGBTQ+
- Scène latine
-
Galerie Suzanne Tarasieve
Carte blanche à Camille Bréchignac
--
Tai Shani , Angleterre
- Art contemporain
- Artistes femmes
- Carte blanche
- Installation / performance
- Sculpture
-
Galerie Jocelyn Wolff
Diego Bianchi , Argentine
"ThéâtrEErreuR"
- Art contemporain
- Installation / performance
- Scène latine
- Sculpture
-
Galerie Zlotowski
Pierrette Bloch, Ella Bergmann-Michel, Louise Bourgeois, Anne-Lise Coste (Uruk), Sonia Delaunay, Jochen Lempert, Sol Lewitt, Vera Molnar, Anthony Plasse, Helen Mirra, Kurt Schwitters, Georges Valmier, Arnaud Vasseux, Josselin Vidalenc, Zohreh Zavareh
--
"chevaliers errantes"
- Art contemporain
- Art moderne
- Artistes femmes
- Carte blanche
- Dessin
- Sculpture