GALERIE VALERIE DELAUNAY
Yoan Beliard , France
Timothée Schelstraete , France
Dans un temps et en un lieu donnés
Yoan Béliard, Témoin, 2023, plâtre et toner, 80 x 112 cm
Quel fin tissu de conjonctions peut bien relier l’œuvre de Yoan Beliard et celle de Timothée Schelstraete ? Sans doute moins celui des sujets ou des motifs que l’on pourrait repérer tour à tour chez l’un et chez l’autre que cette façon commune et partagée d’observer et d’analyser sans relâche le monde et les choses. Ces deux artistes – le premier plutôt sculpteur le second plutôt peintre ; quoique ?… –, n’ouvrent pas des fenêtres sur le monde, ils prennent acte de ce monde qui nous entoure pour mieux le déconstruire finement, puis le réagencer autrement afin de lui apporter de la perspective et de la profondeur. Comme s’il fallait pour eux, chacun à sa manière, désencombrer, désobscurcir ce qui prolifère tout autour de nous – à l’instar d’une coupe dans un bois touffu ou d’un désherbage au sein d’une bibliothèque – dans le but d’y ramener de la lumière, sinon de la clarté, dans un temps et un lieu donnés.
Cette exposition en témoigne tant ils interrogent conjointement notre rapport au réel et la façon dont celui-ci infirme nos rapports aux formes comme aux figures.
Selon Isabelle Monod-Fontaine, l’artiste Constantin Brancusi avait délimité son atelier en deux zones : l’une, publique, lieu de présentation, l’autre, privée, lieu de création, la photographie faisant parfois le lien entre l’un et l’autre. Ici, il ne semble n’y avoir aucune séparation, aucune démarcation : l’œuvre tire sa légitimité du réel et de ses images que l’artiste observe, analyse, absorbe, redéfinit ; puis celle-ci les redouble, les diffracte, les densifie dans son expression même. Elle est contigüe au réel, s’y tient au plus près. Aussi, d’un côté, se laisse-t-elle à tout moment contaminer par celui-ci ; de l’autre, le perturbe-t-elle en retour, parfois comme un écho parfois comme un hoquet.
Yoan Beliard semble néanmoins s’attacher plus particulièrement à la structure intérieure des formes, à cette faculté singulière qu’elles possèdent de s’assembler, de s’associer, presque de s’aimanter entre elles. Alors que Timothée Schelstraete semble, lui, du côté de l’apparition des figures, de leur façon particulière d’émerger, d’éblouir le regard, puis de s’effacer comme le fantôme d’elles-mêmes. Chez le premier, les volumes s’intègrent au plan de l’œuvre en l’occupant tout ou partie, en éprouvant ses limites, en se jouant des interstices moins comme des vides ou des manques que comme des blancs ou des failles de l’espace. Chez le second, les couches se superposent et fusionnement jusqu’à obtenir un tremblement de l’image propre à se jouer des
ombres et des lumières, des présences et des absences. Pour autant, chez l’un comme chez l’autre, le réel, ses formes et ses figures – sinon ses leurres – se retrouvent simultanément en tension, en vibration permanente. Autrement dit, suspendus dans un état de trouble intérieur comme extérieur que renforcent par contraste des effets apparents d’ossatures, de structurations, de marquages plus ou moins affirmés ou suggérés, effectifs ou implicites. Et ces états de fragilité, de précarité, d’impermanence s’affirment paradoxalement comme les conditions mêmes de l’expérience d’un regard, d’une pensée du monde. Leurs œuvres respectives, ici en conversation, deviennent dès lors autant d’indices propres à redéfinir nos certitudes vis à vis du réel, et invitent à une réévaluation continue de ce temps, de cet espace, de cette histoire, de cette mémoire qui constituent chacun d’entre nous.
Marc Donnadieu
Exposition du 04 mai au 10 juin 2023.
La galerie
Créée en 2014, la Galerie Valérie Delaunay est résolument engagée dans la promotion d’artistes émergents dont le travail de peinture et de dessin questionne par l’émotion.
Elle présente notamment le travail d’artistes qui invitent à la redécouverte du travail figuratif qui s’est amorcée dans les années 1990 et s’est développée depuis.
Elle représente, depuis 2018, Timothée Schelstraete, lauréat du prix Novembre à Vitry en 2013 et lauréat 2021 du Prix d’encouragement en Peinture de l’Académie des Beaux-arts et dont deux pièces sont récemment rentrées dans la collection du FRAC Normandie Rouen.
Pendant l'été 2021, la galerie a donné carte blanche au peintre Arnaud Adami, lauréat du prix du portrait Bertrand de DEMANDOLX- DEDONS des Amis des Beaux-Arts de Paris.
D'autres peintres encore sont venus rejoindre la galerie comme notamment Barbara Navi et Florence Obrecht dont une sélection de peintures sera présentée dans l'exposition IMMORTELLE au MOCO au printemps 2023 et Ulysse Bordarias, résident en avril 2023 à la Langen Foundation.
Sensible également au médium du dessin, la galerie représente Hélène Muheim qui réalise ses grands paysages en poudre de graphite, encre et ombre à paupières et qui présentera, pour l'exposition inaugurale de la Fondation Bally en avril 2023 un dessin de six mètres de long et dont un grand dessin vient de rentrer dans la collection du FRAC de Picardie. Depuis 2022, elle est également heureuse de collaborer avec Mohamed Lekleti qui dans une démarche à la fois narrative et poétique, nous livre un regard très personnel du monde contemporain.
Dès le début, la galerie a également initié un cycle OUVRAGES DE DAMES dont le premier commissaire a été Dominique Païni, en invitant des femmes artistes à présenter leur travaux parmi lesquelles Claire Chesnier, Marie Hazard, Giulia Andreani, Kubra Khademi (première exposition personnelle en France à la galerie) ou encore Karine Rougier, lauréate du prix Drawing Now 2022.
A coté de cette programmation de peinture et depuis deux ans, la galerie s'est également attachée à élargir celle-ci à d’autres médiums en représentant Julie Legrand qui réalise des pièces en verre, Yoan Béliard qui présente des oeuvres en plâtre, Claire Lindner qui travaille le grès et qui vient d'être nommée finaliste du Craft Prize de la foundation Loewe ou encore Edith L'Haridon, artiste textile, dont trois oeuvres ont rejoint la collection du CNAP (Centre national des arts plastiques ).
Enfin, une des vocations de la galerie est de consacrer des expositions monographiques à ses artistes, de participer à des foires comme les éditions 2023 de Drawing Now (la galerie a présenté à cette occasion, le travail d'Hélène Muheim et de Mohamed Lekleti, artiste focus) et Art Luxembourg Week, à des expositions hors-les-murs comme Manifesta à Lyon pendant la biennale, à collaborer avec les institutions en sorte de s’engager auprès de chacun d'eux afin de défendre et d’assurer la meilleure diffusion possible de leur travail.
La galerie est membre du Comité Professionnel des Galeries d’Art et du guide Paris Gallery Map.
Les artistes de la galerie
Radu Belcin, Yoan Béliard, Ulysse Bordarias, Julie Legrand, Mohamed lekleti, Claire Lindner, Hélène Muheim, Barbara Navi, Natacha Nikouline, Florence Obrecht, Flavia Pitis, Julie Polidoro, Sylvain Polony, Timothée Schelstraete, Martine Schildge, Fabien Vershaere